Le dunking est une pratique répandue sur les réseaux sociaux (et notamment Twitter) qui consiste à répondre à quelqu’un en quelques mots en espérant pointer une contradiction ou une erreur. Si possible en essayant de clasher un peu, pour faire du drama et se faire mousser un peu.
Le dunking n’est pas du troll, car le troll est surtout là pour jeter de l’huile sur le feu. Le dunker, lui, a des intentions différentes. Il peut même avoir raison, et faire une remarque dont le fond est légitime.
Voici un bel exemple de dunking (raté) :
Unpopular opinion : trop souvent, lorsque les spécialistes de sciences naturelles abordent des questions de société, c’est pour dire des banalités bardées de naïveté.
Je suis de plus en plus déçu par les interventions d’Aurélien Barrau. https://t.co/3PLNnFqLGc
— Olivier Simard-Casanova – In English (@simardcasanova) March 11, 2019
C'est marrant votre thread "emporte pièce" et "il faut se documenter" qui part sur une une ENORME erreur. @AurelienBarrau n'est absolument pas spécialiste en sciences naturelles.
— Charles Dexter Ward (@LdaPanam) March 11, 2019
Ahem.
(Vous pouvez vérifier, l’astrophysique est bien listée.)https://t.co/8bq7KMg05n pic.twitter.com/m7c3iJmS9Z
— Olivier Simard-Casanova – In English (@simardcasanova) March 11, 2019
À la rigueur je peux concéder qu’en France, « sciences naturelles » peut, dans certains cas, faire référence à un sous-ensemble plus réduit des sciences naturelles (type biologie, etc.).
— Olivier Simard-Casanova – In English (@simardcasanova) March 11, 2019
Mais 1) le français de France n’est pas la seule langue qui existe, tout le monde n’est pas au courant de ces subtilités 2) l’organisation des sciences en France n’est pas non plus la seule qui existe.
— Olivier Simard-Casanova – In English (@simardcasanova) March 11, 2019
Et 3) avant de faire critique sur un terme possiblement ambigu, la charge revient à *l’autre* de vérifier quelle acceptation du terme est utilisée par son interlocuteur, ce que ce monsieur n’a absolument pas fait. Ce qui n’est clairement pas à son honneur.
— Olivier Simard-Casanova – In English (@simardcasanova) March 11, 2019
Cela étant, le dunking n’est pas une forme de débat. C’est un artifice rhétorique dont l’objectif est plus ou moins de ridiculiser l’autre – et sans doute aussi de flatter notre propre égo en montrant au monde en quelques mots à quel point moi, j’ai compris le sujet abordé. Pour cette raison, il me semble que c’est une pratique à bannir de l’arsenal sceptique, au même titre que les attaques personnelles, les argumentations sans preuves et autres sophismes et paralogismes.
Je ne dis pas qu’il est facile de résister à l’envie de dunker, en particulier sur Twitter qui est aujourd’hui devenue une machine à dunker. Mais je pense qu’il faut tout faire pour résister à cette envie. En particulier, j’ai ces deux pistes en tête :
- Se demander ce qu’a réellement voulu dire la personne en face, avant de l’attaquer pour des propos que l’on a peut-être mal compris…
- En cas de doute, questionner la personne pour lui demander d’étayer ses propos, bien évidemment sans agressivité et en lui laissant, jusqu’à preuve du contraire, le bénéfice du doute
En tant que sceptiques, nous voulons diffuser au plus large l’esprit critique. Ce qui nous réunit est sans doute la volonté d’éviter que les gens ne se fassent avoir par les bullshiteurs de tous ordres. Cela fait de beaucoup d’entre nous des passionné.e.s. Mais cette passion ne doit pas être une excuse à des comportements détestables. Au contraire même !
J’y reviendrai sans doute dans de futures publications, mais cela n’implique pas non plus qu’il faille être tendre lorsque l’on se place dans un rôle de contre-pouvoir, et que l’on demande des comptes à des personnes ayant une forme de pouvoir comme les politiques ou les journalistes.
Mais je ne suis pas certain que si pour lutter contre le bullshit nous utilisons des méthodes de brutes, nous (et la société dans son ensemble) y gagnons réellement au change…