Le retour du podcast, ça vous tente ?

Si vous avez commencé à me suivre au temps du Signal Économie, vous savez peut-être que j’avais à l’époque un podcast audio. Le principe était simple : pendant 1h, un ou une chercheuse en économie venait parler de ses travaux.

J’avais eu l’occasion d’enregistrer un certain nombre d’épisodes avec des chercheurs et chercheuses très inspirant.e.s. Le podcast a pris fin en même temps que Le Signal Économie, et n’a pas vocation à revenir sous son ancienne forme.

Mais…

Il serait prématuré d’annoncer quoi que ce soit, mais sachez que j’envisage un certain nombre de nouveautés pour L’Économiste Sceptique, et ce à très court terme – je parle de semaines. Je sens que L’Économiste Sceptique bénéfice d’un engouement que je n’ai jamais vraiment eu avec Le Signal Économie, et je compte bien en faire quelque chose. Mais avant de faire la moindre annonce, il faut déjà que j’organise un certain nombre de choses dans ma vie et en termes de logistique, pour que la production de contenu me soit simplifiée au maximum1La sortie de la vidéo dont je parle depuis des mois est toujours au programme, mais j’ai dû la retravailler lourdement pour qu’elle s’intègre à ces nouveautés sur lesquelles je travaille en parallèle..

Tout ça pour dire que j’aimais bien l’idée du podcast, qui permettait d’avoir une longue conversation avec un.e chercheur.se. Et que ça ne me déplaira pas d’en relancer une version mise au goût du jour.

En particulier, j’adorerais y inviter des chercheurs et chercheuses en sciences humaines et sociales qui ne sont PAS économistes. Sociologie, histoire, sciences politiques, anthropologie, je connais moins bien ces disciplines, et avoir une ou un spécialiste sous la main pendant une heure ou deux serait l’occasion de faire un peu mieux connaissances avec elles2J’ai une double licence économie-sociologie, donc je connais un peu moins mal la sociologie que les autres. Mais c’est à peu près tout.

Une autre évolution serait un format « conversation » plus libre que l’ancien format, trop rigide à la fois sur le timing et sur la structure, trop scolaire. Et plus aucun engagement sur la régularité de la sortie des épisodes – engagement que je n’ai jamais réussi à tenir de toute façon… L’idée serait de sauter sur des occasions pour inviter des gens que j’aimerais entendre davantage, comme celle-ci :

https://twitter.com/ecosceptique/status/1171930941822033921?s=21

Qu’en pensez-vous ? Est-ce que ce format vous intéresserait ? Qu’attendriez-vous d’un tel format ?

Dites-moi ce que vous en pensez en commentaire de cet article. Merci !

Les hypothèses de mon modèle sont fausses : est-ce bien grave ?

Une « critique » souvent faite à la science économique est que les hypothèses de ses modèles seraient « irréalistes ».

La question du « réalisme » dans les sciences est une vaste et difficile question : est-ce que la courbure de l’espace-temps causée par un corps massif est un concept « réaliste » ? Est-ce que l’idée que la matière serait composée d’atomes eux-mêmes principalement composée de… vide est « réaliste » ?1Je ne prétends pas répondre à ces questions. Je dis juste qu’en posant la question du « réalisme » sur des théories habituellement perçues comme solides, on voit bien que c’est une question en réalité plus compliquée qu’on ne l’imagine.

Plutôt que « réaliste », je vais plutôt utiliser le terme de « faux ». Il me paraît nettement moins ambigu. Et c’est d’ailleurs une critique également faite par certain.e.s aux économistes : les hypothèses de nos modèles seraient « fausses ».

Dire que les hypothèses seraient « fausses » est déjà en soi loin d’être évident, mais admettons que la critique soit fondée. Est-ce bien grave ?

Une erreur souvent commise lorsque l’on s’intéresse à un modèle est d’oublier qu’il s’agit d’une description simplifiée de la réalité. Cela signifie que l’on va volontairement mettre de côté tout un tas de dimensions du phénomène étudié pour se concentrer sur ce qui nous intéresse. Cette manière de faire est très bien résumée par l’adage suivant :

Tous les modèles sont faux, mais certains sont utiles.

J’aimerais prendre un exemple spectaculaire de ça : la conception des ailes d’avion.

Les équations qui régissent l’écoulement de l’air autour d’une aile sont très difficiles à résoudre. Même de puissants ordinateurs n’y parviennent pas. On doit se contenter d’approximations. Or, pour faire ces approximations, il est parfois nécessaire de… faire des hypothèses dont il est évident qu’elles sont fausses !

Pourtant, grâce à ces simplifications, il a été possible d’utiliser un modèle basée sur une série d’hypothèses complètement fausses pour concevoir des ailes d’avion ! C’est parfaitement expliqué par David Louapre à la minute 16:24 dans cette vidéo :

En d’autres termes, un modèle dont on sait qu’il viole plein d’hypothèses a tout de même permis de concevoir des ailes d’avion ! N’est-ce pas bluffant ?

Comme je l’expliquais plus haut, pas tant que ça en réalité : certes, le modèle fait plein d’hypothèses fausses, mais rien ne dit que ces hypothèses fausses l’empêchent de décrire suffisamment bien le phénomène que l’on veut étudier. La clé étant ici « suffisamment bien », car selon les besoins de la question de recherche posée, on pourra se satisfaire d’un modèle plus ou moins « faux ».

Quand ce sont des physiciens qui font ces hypothèses, c’est à la rigueur une curiosité. En tout cas, personne ne semble trouver à y redire. Mais quand ce sont les économistes, certains en concluent que la science économique n’est pas une science, et qu’il faudrait s’en débarrasser au plus vite. Pourquoi cette différence de traitement ?

Mon hypothèse est que dans le cas de l’économie, il existe tout un bataillon d’individus qui passent leur temps dans les médias à diffuser leur bullshit sur la discipline. Pourquoi font-ils ça ? Pour se faire élire. Pour vendre des livres. Pour l’attention que cela procure. Les objectifs peuvent être variés.

Le problème est que la démarche scientifique appliquée aux questions économiques et sociales finit comme victime collatérale de ce bullshit. Au point que la discipline a une image désastreuse auprès du grand public, alors qu’en discutant quelques instants avec lui on se rend compte très vite qu’il… ne la connaît pas !

Maladroitement, c’est un peu ce dommage collatéral (et ceux qui en sont à l’origine) que Pierre Cahuc et André Zylberberg ont dénoncé dans leur ouvrage Le Négationnisme économique. Mais plus que jamais, l’idée qu’il existe des charlatans qui instrumentalisent la science économique pour leurs intérêts au détriment de toute rigueur et de toute volonté de bien faire me paraît pertinente. Et le scepticisme peut nous donner des outils formidablement puissants pour identifier ces discours fallacieux, et les mettre de côté pour nous concentrer sur des discours qui, eux, nous permettent réellement de comprendre notre réalité économique et sociale. Avec toutes les forces et toutes les faiblesses inhérentes à la méthode scientifique.

Le luxe rend-il heureux ?

Cela vous étonnera peut-être, mais les questions de recherche de ce type font partie des questions que se posent les économistes. Car non, la science économique n’est pas une discipline « matérialiste » qui s’intéresse à comment accumuler le plus d’argent possible, son objet d’étude est en réalité très vaste.

Mathieu Perona sur le blog de L’Observatoire du bien-être :

S’ils n’ont pas une valeur d’usage très différente de celle des biens conventionnels […], les biens de luxe sont porteurs d’un message : celui que leur propriétaire est capable de se les payer. […] Ils signalent sa position sociale.

Les biens [positionnels] viennent ainsi nourrir chez leurs propriétaire cette satisfaction liée à la sensation d’être au sommet de l’échelle sociale, de faire partie de l’élite — et ce au détriment de la satisfaction de vie des autres personnes qui y sont exposées et font face au fait qu’elles ne font pas partie de cette classe supérieure.

Tout un champ de recherches travaille à étudier les relations entre les déterminants de la satisfaction de vie et les valeurs que professent les individus. […] L’effet sur la satisfaction de vie de biens positionnels [est] plus [fort] chez les personnes qui professent un niveau de matérialisme élevé, c’est-à-dire qui accordent une grande importance à la réussite matérielle. Les effets […] vont donc jouer à plein chez eux, en positif comme en négatif. D’autant plus que l’attachement à ces valeurs s’accompagne souvent de la recherche par ces mêmes personnes d’une validation externe. Cette recheche est associée à des niveaux de bien-être, dans une vaste gamme de domaine (relations avec les autres, sens de la vie, etc.) plus faibles que les niveaux observées par les personnes qui ont des valeurs intrinsèques, i.e. qui ne dépendent pas d’une validation extérieure. 

Le contexte social joue également dans l’importance des effets. Ainsi, certaines cultures — les chercheurs citent en exemple celles d’Asie du Sud-Est, valorisent très fortement la position sociale.

Pour résumer, les biens de luxe n’apportent qu’une satisfaction transitoire aux personnes pour qui la validation extérieure est importante – et je ne porte aucun jugement en disant cela. Au bout d’un moment, on finit par s’y habituer, et c’est peut-être aussi pour cette raison que le luxe prend parfois l’allure d’une course chez les personnes ont les moyens de la courir – en plus de la traditionnelle course à l’armement du bien positionnel : si un bien x devient courant, il devient plus difficile de se signaler comme faisant partie de « l’élite ». Pour continuer à se signaler, il faudra donc s’équiper d’un bien encore plus luxueux.

Pour approfondir cette question, et notamment la définition des biens positionnels, je vous encourage à lire l’article de blog complet.

Quels économistes croire ?

Vu sur Twitter, un thread qui donne quelques pistes pour se faire une opinion quand :

  1. On n’est pas spécialiste
  2. Deux « camps » semblent s’opposer

L’objet de ce thread était la psychologie évolutionnaire, mais je pense qu’il s’applique aussi très bien à la science économique. D’autant que cette dernière est souvent présentée, à tort, comme composée de « camps » qui seraient tous plus ou moins équivalents selon nos propres dispositions idéologiques. Il n’y a pourtant rien de plus faux.

MàJ 2019-11-12@18:50:37 Les tweets suivants ont malheureusement été supprimés par leur auteur, et à part pour les deux premiers, ils n’ont pas été archivé par Google ou par Internet Archive. Je crains malheureusement qu’ils ne soient à jamais perdus, et avec eux les idées qu’ils contenaient. À l’avenir, je ferai des copies d’écran des tweets, plutôt que simplement les mettre en lien.

Source : https://twitter.com/alex_technoprog/status/1164079926938656768?s=21
Source : https://twitter.com/alex_technoprog/status/1164079972484624384?s=21

https://twitter.com/alex_technoprog/status/1164080013555228673?s=21

https://twitter.com/alex_technoprog/status/1164080101258137600?s=21

https://twitter.com/alex_technoprog/status/1164080209466990592?s=21

https://twitter.com/alex_technoprog/status/1164080292342243328?s=21

https://twitter.com/alex_technoprog/status/1164080375355858944?s=21

https://twitter.com/alex_technoprog/status/1164080462962286592?s=21

Pour résumer, une stratégie sceptique serait :

  1. Suspendre son jugement
  2. Être attentif.ve aux arguments des « critiques », qui peuvent s’avérer fallacieux – et dans mon expérience, il existe une « littérature critique » sur la science économique qui se fonde sur un énorme homme de paille
  3. Essayer de s’exposer aux idées du « camp d’en face », pour voir comment il répond à ces critiques. Si ça se trouve, les critiques n’en sont pas, ou ont déjà fait l’objet d’une réponse

Cette liste est mon interprétation du thread que je cite. Je ne prétends pas non plus qu’il s’agisse d’une stratégie infaillible ou quoi. Mais ça peut servir de point de départ.

Car on me demande souvent « qui croire quand deux économistes semblent s’opposer ? ». Et jusqu’à présent, je n’ai pas eu de réponse qui m’a semblé convaincante.

J’ai (enfin !) signé la tribune #NoFakeScience

Il y a quelques semaines, un collectif de vulgarisateurs a rédigé et publié une tribune appelant les médias à mieux traiter l’information scientifique. C’est peu de dire que cette dernière a été passablement malmenée ces derniers temps…

Après lecture et un petit temps de réflexion, j’ai finalement décidé de signer moi aussi la tribune. Cette dernière n’est pas parfaite, mais là n’est pas la question. La question est qu’elle identifie un vrai problème, qu’il faudra sans doute que l’on essaie un jour de résoudre.

Bonjour, c'est Olivier – alias L'Économiste Sceptique 🙂

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